Prévention spécialisée

Le travail de rue est l’outil fondateur et central de la Prévention Spécialisée, voie privilégiée de la rencontre avec le public. Cette présence sociale cible les zones de regroupement des jeunes de 11 à 25 ans : halls d’immeubles, esplanades, squats, centres commerciaux, sorties de collèges… Elle se déroule à heure fixe, selon des parcours quasi immuables afin d’être repéré à la fois par les jeunes mais également par les familles et les partenaires.

Néanmoins, à d’autres moments, les déambulations des éducateurs sortent de cette régularité pour explorer d’autres lieux, d’autres temps afin de constater les changements d’habitudes des jeunes, de nouveaux lieux de rassemblements, l’évolution des groupes de pairs, l’investissement de squats… ou encore pour percevoir l’ambiance qui règne tant au sein de nos sites d’intervention que dans le reste de la ville.

Au cœur de cette démarche, le concept « d’aller vers » trouve tout son sens ; aller à la rencontre pour gagner la confiance et accompagner vers une insertion scolaire, sociale et professionnelle pérenne.

Comment définir le concept de veille éducative ?

Pour les personnes étrangères à la Prévention Spécialisée, il n’est pas clair, loin s’en faut. Elle est pourtant essentielle à notre pratique.  « Elle permet d’être là au bon moment ».

La relation avec un jeune n’est jamais linéaire, il est tantôt omniprésent, tantôt fuyant, dans le dialogue ou l’esquive. L’éducateur doit savoir s’adapter à ces changements d’humeurs, d’envies, de besoins, de postures. Il doit être discret quand nécessaire mais rester ouvert à l’échange. Il doit observer les modifications de comportements, les transformations physiques, les évolutions relationnelles, entendre ce que dit le collège, la Mission Locale, tenter des relances et attendre le bon moment pour que le « si tu veux, on en parle » soit accepté. Il doit savoir repérer les critères d’alerte.

La démarche est similaire avec les groupes, leurs dynamiques, et la place de chacun en leurs seins. 

Comment mesurer ce temps durant lequel l’éducateur attend le bon moment ?  C’est un travail de dentellière qui permet de belles victoires : un accès aux soins, un 1er rendez-vous en Mission Locale, une entrée en formation… Cela représente en réalité des heures de patience, d’échanges parfois muets, de réflexions, de recherches et de cheminement ensemble même si par moment le jeune se tient à distance.

Cette veille est rendue possible par la présence quasi quotidienne des équipes sur les lieux de vie du public. Peu de professions éducatives peuvent revendiquer ce luxe.

Les équipes éducatives assurent régulièrement des permanences dans nos locaux au sein de nos quartiers d’intervention. Elles donnent l’occasion à notre public de rencontrer les éducateurs, sans rendez-vous, en fonction de leurs envies et de leurs besoins.

Complément de la présence dans la rue, elles permettent

  • D’accueillir un public qui entretient des relations difficiles avec les institutions ou qui recherche la discrétion.
  • D’élaborer des projets. Vécu comme un lieu ouvert, respectueux à l’égard des personnes et de leur mode de vie, le local est le théâtre de nombreuses expressions collectives ou individuelles.

Les équipes éducatives organisent des activités destinées aux familles habitantes des quartiers. Ils prennent également part aux initiatives élaborées par leurs partenaires.

  • Fêtes et repas de quartiers
  • Sorties familiales
  • groupes de réflexion

Les objectifs sont multiples :

  • Susciter la rencontre entre les habitants et participer ainsi à la création ou au renforcement de liens sociaux, intra ou inter quartiers.
  • Inciter les habitants à prendre la parole, à exprimer leurs désirs et à élaborer des solutions collectives.
  • Donner l’occasion à l’équipe éducative de rencontrer de nouvelles familles, parents et enfants
  • Profiter de ces temps de convivialité pour renforcer nos liens avec les familles des jeunes accompagnés.

Comment redonner confiance malgré les épreuves ? Comment aider notre public à se projeter dans le temps et à rompre avec les conduites délictuelles ? Comment favoriser leur insertion sociale et professionnelle ?

Le jeune n’établit pas forcément de liens de causalité entre son histoire et la souffrance qu’il ressent. Il éprouve des difficultés à se départir d’un fonctionnement immédiat, à se projeter dans le temps. Il a du mal à se comprendre lui-même et face aux autres. Il a une estime de lui très dévalorisée. La création d’une relation de confiance constitue un préalable à la formulation d’une demande d’aide auprès de l’éducateur. Ce mode d’intervention est un des prolongements possibles du travail de rue.

L’objectif est de développer des compétences sociales ou personnelles de jeunes avec qui le contact s’est affermi, la confiance s’est installée. Il est parfois nécessaire d’attendre plusieurs mois avant que ce type d’intervention ne devienne possible.

L’accompagnement individualisé adopte de nombreuses dimensions : soutien psycho-affectif, aide au projet social et professionnel, prévention du décrochage scolaire, accompagnement des démarches administratives, médicales, judiciaires…

Vis-à-vis de la famille : L’action éducative des professionnels doit participer au renforcement de la fonction parentale et veiller à ne pas s’y substituer

A la demande du jeune, ou avec son accord, la Prévention Spécialisée peut également intervenir dans le cadre familial. Au sein de la famille, l’intervention des éducateurs pourra contribuer à dédramatiser et désamorcer certaines tensions, faciliter le dialogue et permettre ainsi que soient reconnues la place et les attentes de chacun.

A l’extérieur, les démarches effectuées, les médiations et l’accompagnement des parents vers différents services et structures (Education Nationale, loisirs, santé…) auront pour objectif de les placer ou de les réintroduire dans une position d’adulte responsable.

L’association Aiguillage s’inscrit dans la mise en place de deux types de chantiers éducatifs : les chantiers éducatifs rémunérés et les chantiers Trocs.

Les chantiers rémunérés

Les chantiers éducatifs rémunérés sont des outils d’insertion sociale et professionnelle. Ils s’adressent à des jeunes de 16 à 25 ans. Leur durée est variable, de quelques heures à plusieurs jours. Leur objectif est la mise en place d’un processus positif de socialisation pour des jeunes rencontrant des difficultés d’insertion socioprofessionnelle.photo chantier.

Ils peuvent avoir plusieurs finalités : aider les jeunes à prendre confiance en eux, leur donner une 1ère expérience de travail aussi proche que possible des réalités du monde de l’entreprise (horaires, rigueur, respect des consignes…), leur permettre d’avoir de petits revenus, leur donner l’occasion de participer à un projet collectif, leur apprendre à gérer leur temps et à s’organiser…. Par ailleurs, ils s’impliquent dans des actions citoyennes et d’utilité commune.photo chantier

Les jeunes sont salariés, titulaires d’un contrat de travail et rémunérés individuellement tout en participant à un projet collectif.

Pour les éducateurs ces chantiers sont d’abord des outils éducatifs. Ces temps de travail partagés avec les jeunes favorisent l’émergence de la relation de confiance. C’est également l’occasion d’évaluer la motivation, les compétences, les capacités d’adaptation des participants afin de leur proposer ensuite un parcours d’insertion professionnelle adapté.

Ces chantiers sont prioritairement réservés aux jeunes sans emploi mais peuvent également s’adresser à des aînés scolarisés en situation d’échec prévisible et pour qui l’entrée dans la vie active se profile à court terme.

Les chantiers trocs

Dans l’esprit des séjours trocs, ces opérations permettent de financer des projets collectifs ou individuels

Contrairement aux chantiers éducatifs classiques, ils peuvent s’adresser à des mineurs de 16 ans mais les exigences de ponctualité, de rigueur, de qualité de rendu sont les mêmes.

Les actions collectives sont des outils essentiels des équipes éducatives. Leurs vocations sont multiples et leurs bénéfices incontestables :

Ce sont en 1er lieu des supports à la prise de contact avec les préadolescents et les adolescents (et les familles).

Les temps partagés entre les professionnels et les jeunes, de quelques heures à plusieurs jours,  permettent l’observation des individus dans le collectif (aptitudes à la socialisation, au respect du cadre, problématiques individuelles…) et des phénomènes de groupe.

Ils sont également des moments privilégiés d’échanges entre les participants et les éducateurs durant lesquels naissent les relations de confiance ; pré requis indispensables à la relation éducative. Avec les jeunes déjà connus, le partage d’expérience renforce les liens.

Le choix des activités et des sorties proposées, des destinations et des thèmes de séjours est capital. Nous nous attachons à accompagner notre public vers la découverte d’horizons nouveaux, éloignés de son environnement et de ses préoccupations quotidiennes en assignant à nos activités des dimensions pédagogiques et culturelles. Nous saisissons toutes les opportunités pour leur proposer une autre lecture du monde et favoriser la découverte d’une société plurielle afin qu’il y trouve naturellement leur place.

La composition des groupes est également un point qui mobilise toute notre attention. A quelques exceptions près, motivées par des objectifs particuliers, la mixité de sexes,  et d’origines ethniques est systématiquement recherchée. Il nous apparait en effet que partager des moments, à fortiori ludiques, apprendre à connaître nos différences, à les comprendre constituent un rempart contre l’intolérance et le rejet de l’autre.

Enfin, les sorties et plus encore les séjours sont autant d’occasions de rencontrer les familles des jeunes que nous accompagnons afin de leur renseigner sur notre association et de les associer au projet éducatif que nous élaborons avec et pour leur enfant.

Quatre objectifs guident les pratiques de coopération de la Prévention Spécialisée

  • Sensibiliser les partenaires aux problématiques de nos publics.
  • Favoriser l’intégration des jeunes, des familles et des groupes dans les dispositifs d’accès aux droits auxquels ils peuvent prétendre.
  • Rechercher des solutions collectives pour soutenir l’insertion sociale et professionnelle.
  • Participer à des instances de concertation et de réflexion au service du collectif.